Tahiti : Enquête dans les coulisses d’un paradis
Magazine présenté par Bernard de la Villardière (diffusé sur la chaîne M6 dimanche 18 décembre 2006 et sur TNTV mardi 19 décembre 2006)
LIBRES PROPOS
Comme suite au propos d’un député venu récemment en Polynésie qui a trouvé le reportage sur la Polynésie « exagéré », Madame Laurence LEPRINCE-RINGUET, assistante parlementaire de Mme la députée Béatrice VERNAUDON, donne son avis sur la question de la pauvreté en Polynésie française.
Comme suite au propos d’un député venu récemment en Polynésie qui a trouvé le reportage sur la Polynésie « exagéré », Madame Laurence LEPRINCE-RINGUET, assistante parlementaire de Mme la députée Béatrice VERNAUDON, donne son avis sur la question de la pauvreté en Polynésie française.
Monsieur le député, cher ami,
Ce matin lors de notre brève rencontre vous m’avez parlé d’un reportage sur la Polynésie et vous m’avez dit que vous l’aviez trouvé exagéré car mettant trop en avant la pauvreté, la prostitution etc. C’est sûr que les journalistes aiment faire sensation en accentuant les contrastes.
Je ne l’ai hélas pas vue et Béatrice ne m’en a pas parlé. Le reportage va être à nouveau diffusé en Polynésie.
Mais il y a beaucoup de pauvres en Polynésie et depuis quelques années on voit même, épisodiquement, de jeunes couples qui dorment dans la rue. Cala nous choque terriblement car il y a toujours eu de très forte solidarité dans les parentèles (le lien du sang est très preignant dans la culture polynésienne).
Béatrice qui a été assistante sociale puis chef des services sociaux puis ministre de la solidarité, aurait pu vous faire visiter des quartiers pourris où parfois les parents font manquer l’école à l’un de leurs enfants pour qu’il garde la maison car ils ont peur d’être dépouillés du peu qu’ils ont lorsqu’ils doivent s’absenter tous deux… Dès qu’elle peut évoquer ces problèmes dans ses interventions à la tribune elle ne manque pas de la faire (dernière en date budget de l’outre-mer et prévention de la délinquance, mais les ministres n’apprécient pas). En réalité les autorités du territoire sont en partie responsables de la situation pour avoir complètement occulté la gravité de la situation.
Il y a 7 000 familles en attente d’un logement social. La promiscuité peut être en gangrène du tissu social. Je suis pour ma part convaincue que la situation pourrait s’améliorer si l’impôt sur le revenu était institué avec pédagogie :
1) Bien expliquer que contrairement, aux mensonges véhiculés depuis des décennies, tout le monde n’en sera pas redevable.
2) affecter les sommes collectées à l’acquisition de terres pour construire des logements sociaux et développer les transports en commun pour aller chercher ces gens à l’entrée des lotissements. Ces terres seront fatalement excentrées car le foncier est trop cher.
Actuellement les familles préfèrent s’entasser à plusieurs générations dans des maisons devenues des taudis dans Papeete car elles n’ont pas de voiture pour conduire les enfants à l’école et pour aller travailler.
Cela serait autrement plus salutaire que d’inventer un RMI ou des allocations chômage que l’on ne saurait pas, de toute manière, comment financer sauf à solliciter encore le contribuable métropolitain…
En Nouvelle-Calédonie l’impôt sur le revenu institué par JM TJIBAOU lorsqu’il arriva au pouvoir a, me semble t-il, autant participé à l’apaisement du brasier que les fameux accords de Matignon puis de Nouméa.
M. TEMARU n’a décidemment pas su améliorer la situation des petites gens qui ont massivement voté pour lui.
Depuis quelques années des aides incitatives ont été mises en place par le gouvernement pour repartir vers les îles d’origine qui sont si belles et où il fait encore bon vivre. En réalité, les seuls qui peuvent vraiment bien s’en sortir dans les îles sont les très nombreux et souvent jeunes retraités de la fonction publique Territoriale ou de l’Etat. Ils investissent dans des fermes perlières pour les plus téméraires ou dans des pensions de familles.
Le pakalolo (le cannabis) qui y pousse comme du chiendent fait des ravages est particulièrement fort et dangereux. Il y a 25 ans on se moquait des gendarmes qui étaient les seuls à rechercher les plantations clandestines et qui appelaient la presse pour que leurs efforts payants soient reconnus du public. Aujourd’hui ce sont les parents qui affolés par les ravages, dénoncent les lieux dans les vallées.
L’alcool quant à lui a été et reste un vrai problème.
Heureusement les couples ont moins d’enfants et les parents ont plus d’ambition pour eux. Il y a beaucoup à faire : en Polynésie seulement 30% des jeunes d’une classe d’âge obtient le bac alors que la moyenne nationale est de 65%.
Je vous ai livré ces réflexions avec toute mon amitié et mon attachement à la Polynésie.
Laurence LERPINCE-RINGUET
Assistante parlementaire de Béatrice VERNAUDON